Pour une gestion durable des populations de seiches dans le Golfe du Morbihan Une initiative locale de gestion durable par les pêcheurs

, par  VIARD, Théo

Rapport de stage de Théo VIARD au sein de Blue Fish, (Juillet 2021)
Master 1 Aménagement et urbanisme des territoires littoraux (AUTELI) UBS Lorient

La seiche est une espèce pêchée traditionnellement en sud Bretagne depuis les années 1930. Son exploitation croît de manière spectaculaire dans les années 1960, notamment à cause de la hausse de sa valeur marchande, qui conduit les pêcheurs à se tourner vers l’exploitation des stocks plus abondants et dont l’exploitation n’est régie par aucune régulation. Elle est vendue pour être consommée localement ou bien mise en vente sur les marchés internationaux à destination de l’Espagne ou du Japon notamment. Entre 1990 et 2000, les quantités débarquées en France fluctuent entre 3 500 et 10 000 tonnes par an.

La seiche est exploitée selon différentes techniques en fonction des saisons et des secteurs. Traditionnellement, la pêche s’effectue au casier ou au filet en zone côtière et dans le Golfe du Morbihan, entre le mois de mars et le mois de juin, pendant la période de reproduction des seiches. En saison hivernale, elle est exploitée au chalut au large de Belle île.

Cependant, cette production très fluctuante tend à se réduire d’année en année et la ressource tend ainsi à s’appauvrir. On constate également par ailleurs que la taille moyenne des seiches capturées est en baisse, conduisant à une augmentation des captures de seiches juvéniles et une raréfaction des seiches de plus d’un an. L’ensemble de ces signes tend à démontrer que les stocks de seiches seraient l’objet d’une surexploitation, ne permettant pas aux populations de se renouveler, mettant ainsi en péril les populations de seiches de sud Bretagne ainsi que toute la filière de pêche et de production de la seiche sur le Morbihan.

Aussi est-il apparu primordial pour les pêcheurs et les structures professionnelles des pêches morbihannaises d’encadrer cette activité. Des initiatives personnelles tel que le programme de mise en place de supports de ponte artificiels mené par Thierry Jacob, patron pêcheur à Séné dans le Golfe du Morbihan et Président de l’association de développement durable BLUE FISH, programme appuyé par le Comité Départemental des Pêches et des Elevages Marins (CRPMEM) pour encadrer la pratique, prouvent que la gestion de la seiche en tant que ressource dans les eaux morbihannaises est devenu un enjeu majeur pour la profession.

L’opération « préservation des œufs de seiche dans le Golfe du Morbihan »

Au constat que la préservation des populations de seiches dans les eaux morbihannaises, passait d’abord par la recherche d’un moyen de favoriser leur reproduction dans le Golfe du Morbihan, Thierry Jacob, a ainsi lancé l’initiative depuis plusieurs années, d’installer des supports artificiels pour favoriser la ponte d’œufs dans le Golfe. Ayant déjà constaté que les seiches affectionnaient aussi bien les supports naturels que les supports artificiels, des tables ont été mises au point, constituées d’une grille sur laquelle sont fixés des bouts flottants (ou orins) pour imiter les herbiers de zostères afin d’augmenter les supports de ponte disponibles pour les seiches. L’idée est ainsi d’augmenter le nombre de supports de ponte, afin de réduire le plus possible le nombre d’œufs pondus sur les casiers et de compenser les pertes occasionnées lors de leur remontée et de leur nettoyage en fin de saison de pêche.

Aujourd’hui, l’installation de lieux de ponte artificiels dans le Golfe du Morbihan a déjà été expérimentée 3 années de suite, sur des zones qui avaient été identifiées : soit parce qu’elles correspondaient à des lieux de pontes naturels (dans des herbiers marins ou des massifs d’algues), soit parce qu’elles présentaient des caractéristiques les rendant propices à la ponte d’œufs (température, salinité de l’eau…).

Cette année, 20 supports ont été immergés dans le Golfe du Morbihan. 10 ont été installés en embouchure de la rivière de Vannes, 10 autres en embouchure de la rivière de Pénerf. On estime que cette année environ 12 000 œufs ont été pondus par support à raison d’une moyenne de 150 à 300 œufs par bout.

Une licence pour réglementer l’exploitation de la seiche dans les eaux morbihannaises

Pour conforter et en parallèle à cette initiative, depuis le début d’année 2021, la pêche à la seiche dans les eaux territoriales morbihannaises est régie par un système de licence obligatoire pour pouvoir pratiquer l’activité. Appliquée aux caseyeurs, fileyeurs et chalutiers, elle est attribuée et gérée par le Comité Régional des Pêches Maritimes et des Elevage Marins (CRPMEM) de Bretagne et délivrée au couple propriétaire/navire qui doit s’acquitter d’une contribution, servant à financer le traitement administratif des licences ainsi que des programmes de confortation de stocks ou de préservation de la ressource, comme celui concernant les œufs de seiches.

Par la mise en place de la licence, il s’agit dans un premier temps de poser un cadre pour les pêcheurs pratiquant cette activité. La licence permet de mutualiser la gestion de la ressource avec l’ensemble des exploitants de cette ressource.
Les populations de seiches représentant des stocks particulièrement dynamiques, la majorité des seiches se reproduisent annuellement et, chaque femelle pondant en moyenne 200 à 4000 œufs, les actions entreprises pour leur préservation pourraient ainsi avoir des répercussions favorables rapides.

L’intérêt de ces initiatives d’origine professionnelle s’inscrit à présent dans un soucis de préservation de l’espèce et de la ressource qu’elle représente. La nécessité d’encadrer et d’organiser cette préservation devient aujourd’hui une nécessité avec une double résonance : permettre à la fois de préserver les populations de seiches par une gestion durable de la ressource, et consolider la pérennisation d’une activité de pêche traditionnelle dans le Golfe du Morbihan.

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