Ronan Le Corre : le mystère de la disparition des tellines
La première vidéo rapporte l’intervention de Ronan Le Corre, pêcheur à pied de tellines dans le Finistère. Il a reçu le 8 juin 2022, des mains de Pierre Mollo, le prix « maestro de savoirs vivants » et on comprend , à l’écouter, combien ce prix est justifié. Ronan Le Corre, confronté comme tous ses collègues pêcheurs à pied, à l’effondrement des ressources de ce coquillage, a cherché à comprendre les causes de ce phénomène. Il s’est engagé dans une véritable recherche lorsqu’il a constaté que de nombreuses coquilles étaient déformées. Il ne s’est pas satisfait de la réponse de certains chercheurs qui disaient que ces déformations étaient liées aux dragues utilisées pour la pêche. En multipliant les contacts avec divers chercheurs, en faisant un suivi régulier du plancton, il a constaté une modification importante de ce plancton, ce qui ne permettait plus aux larves de tellines de se nourrir et donc le recrutement chutait drastiquement. En recherchant les causes de cette modification, il a fait le lien avec l’utilisation de pesticides, parfois interdits, dans les cultures florales (tulipes) et maraîchère (asperges) sur les sols sablonneux en arrière de la dune. Un scientifique lui a confirmé le lien entre les changements du plancton et l’usage de ces pesticides.
Une belle leçon.
Katia Frangoudès : il faut un cadre pérenne pour la gestion démocratique de la mer
La seconde vidéo rend compte de l’intervention de Katia Frangoudès, sociologue au laboratoire AMURE de l’UBO à Brest. Elle a rendu compte des résultats d’une recherche sur les blocages de plusieurs projets conchylicoles et d’algoculture en Bretagne. Le but était d’en comprendre les raisons car, a priori, ces projets ne constituaient pas des menaces pour l’environnement, mais des associations riveraines avaient protesté, engagé des recours juridiques et bloqué les projets. En conclusion de cette recherche, elle considère que ces blocages sont liés à l’absence de lieu permanent et pérenne de débat permettant aux divers acteurs de prendre en compte l’intérêt collectif et de se comprendre. Elle constate que le Parc marin d’Iroise peut représenter un modèle pour fonder une gestion démocratique des espaces marins. Élus, scientifiques, associations diverses, marins pêcheurs, confrontent leurs points de vue dans le respect des droits des professionnels de la mer, à l’écoute de leurs savoirs. A l’opposé les concertations ponctuelles, où s’exprime une soi-disant « société civile » constituée d’associations et de lobbys hors-sol, ne constituent en rien des lieux de décision démocratique.
Ce point de vue vient conforter les défenseurs du modèle du Parc Marin, dont nous sommes, à un moment où des scientifiques bien en cour, de grands lobbys environnementalistes et des représentants de la Commission Européenne le remettent en cause parce qu’il n’interdit pas la pêche.
Voilà deux documents qui peuvent éclairer le débat en ce moment de crise et de doutes sur l’avenir de la pêche.
Alain Le Sann