Lettre ouverte aux maires et élus du littoral Les élus doivent se mobiliser pour sauver la pêche

, par  Collectif Pêche et Développement

La pêche française s’effondre par pans entiers, dans l’indifférence

Le plan de casse lié au Brexit n’est qu’un révélateur et accélérateur d’un effondrement de la pêche française, menaçant l’avenir de plusieurs ports.

• Depuis des années, la pêche à pied se réduit en peau de chagrin, victime de la dégradation des eaux et du plancton.
• Les ostréiculteurs subissent des interdictions de vente à répétition à cause des débordements des stations d’épuration
• Les caseyeurs hauturiers disparaissent victimes de la maladie des tourteaux.
• Les marées rouges, brunes, vertes se multiplient témoignant de la dégradation de la base de la vie marine : le plancton.
• Les pêcheurs sont traités de criminels quand ils prennent accidentellement des dauphins et la seule réponse qui se précise est celle d’une interdiction de pêche de plusieurs mois pour les fileyeurs et chalutiers pélagiques dans le Golfe de Gascogne.

Les fossoyeurs des pêcheurs s’activent dans le cadre de campagnes médiatiques

De nombreux acteurs se mobilisent pour accélérer l’effondrement de la pêche tout en prétendant défendre l’avenir des pêcheurs.
• Des chercheurs demandent l’interdiction des engins traînants (dragues et chaluts) pendant que d’autres préparent des campagnes pour interdire les filets et les palangres, considérés somme des engins non sélectifs. Pourtant, on a vu que l’interdiction des filets dérivants dans les années 1990 avait fortement touché plusieurs communautés de pêcheurs (Ile d’Yeu). Des chercheurs et des lobbies environnementalistes demandent aussi la fin de la détaxe carburant et se mobilisent à l’OMC pour cela.
• La Commission européenne et nos dirigeants courent les rencontres internationales – « One Ocean Summit », « Our Ocean », les rencontres de l’ONU, etc... pour promouvoir la politique 30X30 : 30 % d’AMP (quasi réserves de fait) d’ici 2030. Pendant ce temps des fondations et de puissants lobbys environnementalistes préparent déjà la prochaine étape : 50X50, au nom de la préservation de la biodiversité et du prétendu ré-ensauvagement.
• Tous ces décisions se préparent et sont prises en l’absence de représentation des pêcheurs et des forums internationaux (World Fishworkers Forum et WFFP). Des ONG alliées dénoncent également cette exclusion et l’absence de démocratie.

L’urgence démocratique pour les océans et les pêcheurs

La violence des attaques contre les pêcheurs se manifeste à un moment décisif de la fin d’un cycle où il est urgent de préparer l’avenir, de répondre aux nouveaux défis et de repartir sur de nouvelles bases comme les pêcheurs ont su le faire après chacune des crises qui marquent leur histoire.

Tout cela doit se faire dans un contexte d’incertitude sur l’énergie, le climat, la dégradation du plancton, le renouvellement des pêcheurs (hommes et femmes). Ces attaques conduisent à la désespérance alors que l’avenir des pêches ne peut se construire qu’avec les pêcheurs dans un cadre démocratique respectueux de leurs droits et de leurs responsabilités.
Les pêcheurs bretons en particulier ont montré leur engagement en faveur de pêches durables et cet effort est à soutenir et à renforcer. Ainsi, ils ont joué un rôle décisif dans la création du parc marin d’Iroise alors qu’aujourd’hui ces parcs marins sont menacés car ils régulent la pêche sans l’interdire.

Les pêcheurs, avec leurs comités des pêches et l’appui de scientifiques, ont travaillé à la restauration de la langouste rouge, à la sélectivité dans la pêcherie de langoustines, à la gestion pointilleuse des champs d’algues, de la pêche à la coquille St Jacques, de la pêche à pied. Ils ont écarté la senne démersale des eaux territoriales, mis en place des cantonnements, créé leur marque bar de ligne, expérimenté les filets biodégradables, etc...Ces mesures se décident dans un cadre démocratique, en préservant la diversité des pêcheries, en prenant le temps de la concertation. Et cela marche ! Pas besoin des oukases.

Les élus locaux ont un rôle essentiel à jouer pour promouvoir un cadre démocratique pérenne.

Des élus ont commencé à se mobiliser en particulier dans le Pays Bigouden. Aujourd’hui, les pêcheurs seuls ne peuvent se faire entendre d’une Commission Européenne totalement sourde et même en rupture avec les élus européens de la commission pêche. Il faut que les élus locaux se mobilisent par tous les moyens (journées villes mortes ?) pour défendre l’avenir de la pêche.

Il faut aussi mobiliser la société pour défendre une activité essentielle par sa contribution à la sécurité et la souveraineté alimentaires dans des conditions de durabilité. Il faut pour cela créer des cadres démocratiques pérennes pour la gestion des mers, dans le respect des droits et responsabilités des pêcheurs. Il existe un modèle de gestion avec les parcs marins, aujourd’hui menacés parce qu’ils n’interdisent pas la pêche. Ils peuvent servir de base à la mise en place d’une gestion de la ceinture bleue.

Les GALPA, (Groupes d’Action Locale pour la Pêche et l’Aquaculture) en charge de la gestion de fonds européens, peuvent aussi constituer des parlements locaux de la mer en associant les scientifiques et en disposant de moyens financiers venant des futurs parcs éoliens et des taxes sur l’eau des communes littorales. Ces parlements pourraient peser pour reconquérir la qualité des eaux littorales et financer la transition vers une halioécologie. Les ressources se portent mieux et peuvent encore se développer, mais il faut préserver les savoirs et les moyens humains afin d’utiliser ces ressources pour le bien de tous. La pêche doit rester un élément central de notre vie littorale, comme source de nourriture et base d’une culture et de savoirs uniques.

16 Mars 2023.

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