La Journée Mondiale des Pêcheurs à Kalemie, RDC

, par  KAPALAY KABEMBA Jean-Pierre

Ce n’est plus une rumeur, les pêcheurs du Lac Tanganyika regroupés au sein de leur faitière provinciale le COPETANG (Collectif des Pêcheurs du Lac Tanganyika) et leurs collègues d’autres provinces de la République Démocratique du Congo, à savoir la Province du Sud-Kivu, ceux du Mai-Ndombe (Bagata) et du Territoire de Moba dans le Tanganyika ont décidé d’un commun accord sur l’initiative de Slow Food Tanganyika de célébrer pour la première fois la journée mondiale des pêcheurs à Kalemie, l’un des pôles très influent de la pêche dans notre pays. Au lieu d’être une journée ordinaire pendant laquelle les pêcheurs autour d’un banquet, des brochettes, d’un verre de Primus etc… se retrouvent ensemble pour festoyer leur journée, cette fois-ci, les choses se sont déroulées autrement.

Le Slow Food et son partenaire COPETANG ont plutôt consacré cette journée à une réflexion profonde afin de déceler les différentes causes qui sont à la base des échecs répétés de toutes les bonnes initiatives mises en place depuis des années par des différents partenaires afin de faire asseoir une pêche artisanale durable dans le Lac Tanganyika et ses affluents, mais aussi à travers toute la sous-région des grands Lacs et y apporter des solutions locales, nationales et sous régionales grâce à des formations qui seront organisées par l’académie paysanne de pêche de Kalemie
Pour tout observateur averti le constat est que l’avenir de la pêche dans le Lac Tanganyika reste incertain si les mesures fortes ne sont pas prises ici et maintenant.
Il convient de souligner que cette activité s’est étendue jusqu’en janvier 2024 par des séances de sensibilisation dans différents sites de pêche.

Ainsi notre réflexion a porté essentiellement sur les points suivants :

1. Identifier les causes de l’échec de la mesure de fermeture décrétée par l’Autorité du Lac pour régénérer les écosystèmes et les ressources halieutiques, conformément à la charte régionale engageant les Etats riverains du Lac Tanganyika ; les stratégies à planifier pour imposer une pêche responsable qui garantisse la durabilité de l’exploitation pour notre génération et les générations futures.

2. Concevoir avec les pêcheurs les stratégies locales de lutte contre les phénomènes de changement climatique.

3. Déguster des spécialités du Lac Tanganyika, en mettant en compétition les cuisines professionnelles de grands restaurants de la ville et des cuisines traditionnelles des ménagères indépendantes.

L’objectif poursuivi dans cette démarche était d’une manière générale de :

• Promouvoir l’attachement à la nourriture et la cuisine du terroir ;
• Accroitre la cohésion entre les pêcheurs du Lac Tanganyika et ceux de la République Démocratique du Congo.

Et de manière spécifique :

• Sensibiliser les exploitants du lac et les membres de la société civile sur l’importance de la pêche responsable qui protège les écosystèmes et garantir la durabilité de l’exploitation pour notre génération et les générations futures ;
• Valoriser les spécialités culinaires de nos produits de pêche et susciter un intérêt pour la protection de nos ressources halieutiques ;

Résultats Attendus

1. Les exploitants du lac, les responsables de Coopératives et Associations des Pêcheurs, les membres de la Société civile et les autorités de la Province sensibilisés sur l’importance de la pêche responsable et les stratégies à planifier pour imposer les normes règlementaires contenues dans nos lois et la charte régionale des pays riverains du Lac Tanganyika ;

2. Les spécialités culinaires de nos produits de pêche célébrées et valorisées peuvent susciter un intérêt pour la protection des écosystèmes lacustres et de nos ressources halieutiques ;

3. La journée mondiale des pêcheurs est célébrée à Kalemie (Tanganyika) en particulier et en République Démocratique en général ;

4. Les activités de l’académie paysanne de pêche relancées, un code de bonne conduite locale pour lutte contre le phénomène du changement signé et distribué.

Après analyse et échange, il s’est dégagé le constat suivant :

Le lac Tanganyika est surexploité de manière incontrôlée, pollué par toutes sortes de déchets comme cela a été identifié par le passé.

Cette situation entraine :

• La baisse très sensible de la capture des poissons le long de l’année dans un contexte socio-économique difficile aggravant ainsi la précarité de vie des pêcheurs et de leurs familles ;

• La diminution inquiétante de la taille de quelques espèces emblématiques du Lac Tanganyika le LAPES STRAPPERSSI (mikebuka) et de LIMNOTRISSA MIODON (Lumbu), ici la question reste ouverte ;
La diminution de la taille est-elle tributaire du changement climatique ? du manque des nourritures appropriées pour cette espèce des poissons en particulier ou de tous les poissons en général ? ou un autre phénomène qui doit faire l’objet d’une recherche scientifique dans le futur ? Nous en appelons à tous ceux-là qui nous lisent et qui défendent la pêche de se saisir de la question, nous contacter pour étudier ce qui peut être fait dans le futur dans le seul souci de protéger et préserver ces espèces.

Le Slow Food Tanganyika ensemble avec son partenaire le COPETANG, membre du WFFP en appelle à la solidarité des pêcheurs à travers le monde afin de trouver des réponses appropriées à cette question cruciale.

Nous invitons les vaillants défenseurs de la pêche de la France, et bien d’autres et ceux du monde entier à faire un geste en faveur de cette nature en détresse.

Les éléments suivants ont été soulignés comme cause de l’échec.

  • L’approche de plusieurs projets exécutés en faveur des pêcheurs dans la région ne favorise pas leur indépendance économique, mais les place dans attentisme perpétuel ;
  • L’absence d’une politique provinciale de pêche conçue avec les pêcheurs et pour les pêcheurs par l’autorité politico-administrative ;
  • L’absence des lois solides qui règlementent la pêche et sanctionnent les coupables ;
  • La croyance erronée qu’ont les pêcheurs que les poissons ne sont pas des ressources épuisables ;
  • L’absence d’activités alternatives pour les pêcheurs pouvant leur permettre de diversifier leur revenu ;
  • La faible capacité de cohésion des pêcheurs pour mener un plaidoyer commun et se faire entendre ;
  • Le nombre élevé de pêcheurs clandestins est incontrôlés ;
  • Les marchés locaux ne sont pas inondés par comparaison avec les produits d’origine animale etc.

Ainsi les pêcheurs ont pris un engagement ferme :

  • De travailler au profit des générations futures en consommant le surplus des poissons et garder la base pour les générations futures ;
  • Changer le comportement et s’adonner pour la promotion d’une pêche artisanale responsable.

KAPALAY KABEMBA Coordonnateur Slow Food

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