Nouveaux bobards récents sur l’état de la pêche dans le monde

, par  LE SANN Alain

Deux journaux viennent à nouveau de s’illustrer par leur incompétence ou leur mauvaise foi dans la présentation de sujets sur la pêche. Il s’agit du « Canard enchaîné » qui reprend régulièrement des informations fausses pour illustrer des problèmes réels ( pan sur le bec) et du « Monde ».

Le Canard Enchaîné ne connaît rien à la pêche.
L’article du Canard du 24 Août évoque l’interdiction de pêche au-delà des 400 m dans 87 zones du talus continental particulièrement sensibles et il dénonce le lobbying des industriels qui rejettent cette mesure limitant leur activité dans des zones riches en ressources. On peut comprendre une telle mesure comme la résistance des armements concernés. Mais il est malhonnête d’utiliser de faux arguments pour dénoncer l’opposition à cette mesure. Ainsi l’article commence par souligner en gras, le grenadier de roche qui bénéficierait de cette mesure. Or si l’on analyse les données des débarquements en criée pour 2021, il n’y a aucun grenadier de roche débarqué en France. Peut-être y en a-t-il en Espagne, mais il ne faut pas tout mélanger. Il est vrai qu’il reste quelques débarquements de sabre noir et de lingue bleue, mais à des niveaux qui ne doivent pas mettre ces stocks en péril.
La suite est plus grave car elle témoigne d’une incompétence inadmissible dans un journal généralement pointilleux sur ses sources. Il évoque 400 000T de poissons débarqués en France, pêchés par des chalutiers et l’auteur ajoute, 37 % de trop… Il suffit de se renseigner sur les données des criées françaises en 2021 pour constater que les débarquements s’élèvent à 162 147 T.

Sur ce total, les chalutiers et dragueurs représentent 105 027 T, environ les 2/3. Il y a bien quelques débarquements avec ventes directes pour quelques chalutiers et dragueurs, mais c’est peu par rapport aux criées. Ils seraient de 50 000 T, mais ce ne sont pas tous des chalutiers ou des dragueurs. Si l’on comprend bien le Canard, tout bateau de pêche est donc un chalutier.

Le Monde et la mauvaise foi
Dans Le Monde du 25 Août, Martine Valo, dans un article consacré à la protection de la haute mer ne peut s’empêcher de manipuler les données de la FAO sur la surexploitation. « Le nombre de stocks surexploités ne cesse d’augmenter : Selon l’organisation pour l’alimentation et l’agriculture, 35 % d’entre eux sont actuellement trop décimés pour pouvoir se reconstituer, contre 10 % en 1974 ».

Les chiffres sont exacts mais la précision concernant l’incapacité de ces stocks à se reconstituer est totalement erronée et ne correspond pas à l’analyse de la FAO : « La reconstitution des stocks surexploités pourrait accroître la production des pêches de capture marines de 16,5 millions de tonnes et contribuer ainsi à la sécurité alimentaire, à la nutrition, à l’activité économique et au bien-être des communautés côtières ».

La FAO considère bien que la reconstitution des stocks reste majoritairement possible. Par ailleurs, Martine Valo oublie volontairement de préciser que : « malgré l’aggravation des tendances indiquée par les chiffres, les stocks exploités à un niveau biologiquement durable représentaient 82,5 pour cent des débarquements de produits d’origine aquatique en 2019, une augmentation de 3,8 pour cent par rapport à 2017 [1] ».

Pourquoi ne pas signaler également cette nouvelle plutôt rassurante sur l’évolution des débarquements ?
Alain Le Sann

[1FAO. Résumé de la Situation mondiale des pêches et de l’aquaculture. Vers une transformation bleue. Rome. 2022

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